Le Xylophone

Une minute lumière glanée au fil de l’existence,  un moment où le regard s’éveille, découvre, s’enthousiasme, un moment qui en rappelle un autre et la mémoire s’active, un moment pour rien aussi, ou simplement le plaisir du geste.

 

C’est haut perché le paradis, on se retrouve là en famille, cadeau d’anniversaire.
C’est vraiment haut le paradis, les yeux à pic scrutent avides la scène déserte encore.
Et la salle se remplit comme les vases communiquent, les êtres ruissellent de haut en bas.
Le paradis affiche complet bien avant l’arrivée des séants sur les sièges velours de l’orchestre.
L’argent achète le temps, les escaliers à gravir, les couloirs à se perdre, l’attente à sauter dans le vide.
Soudain dans les jambes le coton se substitue à la fibre musculaire.
Sens en vertige et nausée à l’affut, une envie de fuir, d’échapper à l’abîme de la cascade.

Les yeux se ferment, l’esprit se concentre sur la respiration.
Au-dehors des voix teintent en timbres de couleur le murmure de la salle.
Un beau programme, c’est haut quand même, c’est beau ce bois, t’as le ticket, regarde regarde.
Derrière les yeux fermés, le son du xylophone.
Pas de mélodie, des gammes inachevées qui font taire le paradis. Seulement le paradis.

Le concert commence, toujours il commence là, à l’échauffement des gestes, à l’égrenage des sons.
Les yeux s’ouvrent, trouvent sans difficulté l’homme qui agite ses mailloches au-dessus des lames.
D’instinct les mains attrapent le téléphone photographique, et à travers l’écran le vertige s’oublie.

 

 

 

 

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@anne-lise maurice, m.o.m.i., mai-juin 2018, mise à jour 30 juillet 2018